Question au Gouvernement sur le statut des stagiaires

Monsieur le Ministre ,

Ma question porte sur le scandale du statut des stagiaires. Ou plutôt du scandale des stages sans statut. La question a été soulevée avant-hier par le député socialiste Yves Durand.

Si nous sommes favorables aux stages en entreprise comme complément pratique d’une formation, nous ne pouvons accepter que les stagiaires puissent servir de main-d’œuvre bon marché.

Aujourd’hui, les stagiaires sont utilisés par les entreprises et les administrations pour assumer des tâches de salariés. Ce qui est devenu de fait un premier emploi est le plus souvent indemnisé à 30 % du Smic, sans congés payés, sans RTT, sans remboursement des frais de transport et de restauration. Et très souvent, le stagiaire ne reçoit même aucune indemnité. Il doit alors payer pour travailler. C’est le sort des stagiaires dans les consulats et ambassades qui malgré une formation de haut niveau doivent payer transports et hébergement. D’après Libération, ce serait aussi le cas à Matignon.

Face à cette situation, le mouvement « Génération Précaire » a protesté depuis deux mois, contre les abus de stagiaires, par exemple dans les entreprises où ils deviennent la principale force de travail. Quelles solutions envisagez-vous, monsieur le ministre, face aux stages qui camouflent en réalité un premier emploi ?

A l’Assemblée, vous avez proposé une « charte de bonne conduite ». Vous vous êtes appuyé sur un rapport de 2005 du Conseil économique et social. Or, contrairement à vous, ce rapport « souligne la nécessité de procéder à un réexamen des conditions statutaires des stages en entreprise ». Pas une charte.

Comment pouvons-nous croire qu’une simple charte de bonne conduite puisse être une réponse ? Est-ce qu’on propose aux chauffards une charte de bonne conduite pour remplacer les radars ? Face au travail illégal, vous êtes-vous contenté d’une charte ?

A quoi aboutirait une charte ? Les entreprises vertueuses se sentiraient engagées, alors que les autres continueraient leurs abus et profiteraient de cet effet d’aubaine toujours autorisé.

D’ailleurs, en parlant de charte de bonne conduite, vous placez le débat sur le plan moral. En réalité, les entreprises sont à la recherche d’une main-d’œuvre au moindre coût. C’est pour ça que le Medef est d’accord avec votre idée de charte.

« Notre droit réprime les abus », avez-vous dit mardi. Mais les abus par rapport à quoi ? Par rapport à quelle règle de référence ? Il n’y a pas une ligne sur les stagiaires dans le code du travail ! Personne n’est capable de donner une définition juridique du stage.

Vous avez fait référence à un arrêt de la Cour de Cassation de 1993, qui permet de requalifier un stage en contrat de travail. Combien de contrats de travail ont-ils été ainsi créés ? Est-ce que vous pensez réellement que des stagiaires, à qui revient la charge de la preuve, sont capables de saisir les prud’hommes et de prouver que leur stage est un abus, c’est-à-dire de prouver qu’ils ont été « productifs » « sans bénéficier d’aucune formation », pour reprendre les mots de la Cour ?

Nous ne pouvons que saluer le courage des stagiaires qui ont dénoncé ces abus. Leur action doit être relayé par le Parlement.

Ma question est donc : quelles sont les véritables mesures que vous prévoyez dans le Code du travail pour empêcher que les employeurs utilisent des stagiaires pour ne pas embaucher, voire même licencier des salariés ? A moins bien sûr que le Ministre de l’Intérieur proclame le « dépôt de bilan » du Code du Travail.