« Primaire Hulot-Joly : la « grande salade verte » va-t-elle mal tourner ? » (Public Sénat)

Le 06.06.2011 à 19:25
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« Il y aura des bagarres politiques pour la primaire, mais saluons la synthèse de ce week-end ». Le sénateur d’Europe Ecologie-Les Verts, Jean Desessard, résume la situation à sa manière, au moment où la formation écologique sort de son congrès et rentre dans sa primaire. Un congrès qui a vu sa secrétaire nationale Cécile Duflot réélue par les délégués avec un score plus que large : 92,7% ! Un score dû à la fusion avec la motion de Daniel Cohn-Bendit, dont la défaite, après le vote des militants, lui est restée au travers de la gorge. Absent ce week-end à La Rochelle, l’eurodéputé a affirmé qu’« à ce congrès rien ne s’était passé »… « Le rôle que joue Dany est assez incompréhensible depuis quelques mois, ce qui explique le mauvais score de sa motion », tacle le conseiller régional EELV du Centre et soutien de Nicolas Hulot, Christophe Rossignol, joint par publicsenat.fr.

Daniel Cohn-Bendit n’a remarqué qu’une chose à La Rochelle : « Ce qu’on a appelé la boulette de Nicolas Hulot ». Lors d’un repas avec des journalistes, l’animateur télé s’est laissé aller à cette confidence : il a un temps pensé à un « tandem » avec l’ex-ministre de l’Ecologie de Nicolas Sarkozy, Jean-Louis Borloo. Il n’en fallait pas moins pour que les supporteurs d’Eva Joly, partisans d’une alliance à gauche, s’engouffrent dans la brèche. Yannick Jadot : « Il porte un sujet qui est un vrai sujet pour l’écologie politique : est-ce qu’il suffit de se proclamer écologiste pour l’être ? Quel est le sens de l’écologie politique ? Est-ce que Jean-Louis Borloo mérite de rejoindre potentiellement EELV ? Ou bien le fait qu’il ne soit plus aujourd’hui dans la majorité présidentielle parce que Sarkozy n’a pas voulu en faire son premier ministre est disqualifiant ? Je considère que c’est disqualifiant », tranche Yannick Jadot, interrogé par publicsenat.fr. « Borloo n’a rien trouvé à redire quand le chef de l’Etat à dit « l’environnement, ça commence à bien faire ». Il n’a rien dit non plus sur le discours de Grenoble », insiste-t-il.

« Joly c’était la droitisation du parti quand elle est arrivée »

En face, on pense au contraire que « ces réactions révèlent un mouvement de panique assez fort chez les amis de Joly. Beaucoup de gens basculent pour soutenir Hulot en ce moment », assure Christophe Rossignol. S’il reconnaît que son favori « manque encore de quelques codes », suite à sa déclaration, il défend sa position : « La logique de rassemblement des écologistes pour Nicolas Hulot, ce n’est pas le combat entre droite et gauche. Il y a des gens pour qui c’est un blocage. L’idée, c’est de dire bienvenu à tout le monde, à condition de partager nos positions. De toute façon Jean-Louis Borloo est clairement dans la majorité pour le moment donc la question ne se pose pas ».

Christophe Rossignol prédit « un effet Boomerang pour Eva Joly. On lui fait jouer le rôle de responsable de l’extrême gauche des Verts, or tout le monde sait que ce n’est pas vraiment ça. Pour beaucoup, Joly c’était la droitisation du parti, quand elle est arrivée », lance le conseiller régional, rappelant la tentation du Modem pour l’ex-magistrate. Il ajoute : « C’est contreproductif pour elle. Ça la ramène à son passé ».

« C’est extraordinaire », s’étrangle Yannick Jadot, « François Bayrou a fait une proposition à Eva Joly au moment où il avait fait 16% à la présidentielle et Les Verts 1,67%. Or elle a refusé la proposition de Bayrou pour accepter celle de Daniel Cohn-Bendit. Je rappelle que Bayrou est un centriste qui a toujours été critique vis-à-vis de la politique de Nicolas Sarkozy. Ça n’a rien à voir avec Borloo ».

« Borloo vient de tendre la main à Villepin. Ça ferait un drôle d’arc politique »

Pour Yannick Jadot, l’ouverture d’Europe Ecologie-Les Verts ne doit pas se faire à n’importe quel prix. « L’ouverture, ce n’est pas la confusion. Et là, on est dans la confusion. On serait dans une ligne qui n’aurait pas de cohésion. Ce serait une grande salade verte »… « Borloo vient de tendre la main à Villepin. Ça ferait un drôle d’arc politique », ajoute l’ex-patron de Greenpeace France.

Pour Eva Joly, moins populaire qu’Hulot dans les sondages et davantage sur une ligne de gauche, la sortie plus ou moins contrôlée de son adversaire tombe à pic : « La primaire va mettre en valeur ce qui différencie les candidats », espère Yannick Jadot. Chez les pros Hulot, on affirme que « Nicolas Hulot s’adresse aux Français » alors qu’« Eva Joly s’enferme avec ses amis pour voir qui la soutient à l’intérieur du mouvement », lance Christophe Rossignol… Après deux autres débat, à Paris et Lille, un premier tour le 29 juin et un éventuel second le 12 juillet, la primaire des écolos sera courte. Vue la tournure que prennent les débats, c’est peut-être mieux pour eux.