Intervention de Jean Desessard sur les conclusions de la Commission mixte paritaire concernant la proposition de loi tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires – 12 juin 2014

Monsieur le président,

Madame la ministre,

Monsieur le rapporteur,

Madame la présidente de la commission des affaires sociales,

Monsieur le président de la commission des affaires économiques,…

– Je m’arrête là, sinon tout mon temps sera consacré à des salutations ! –,

Mes chers collègues,

 

La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui se fixe deux principes : les stages, d’abord, doivent rester un temps de formation, ils ne peuvent être considérés comme un emploi et doivent s’inscrire dans un projet pédagogique ; ensuite, ils doivent relever d’un cadre unique permettant d’édicter un ensemble de règles pour limiter les abus.

Pour les étudiants, le stage constitue un moment important de la formation. Il leur permet de se confronter à la réalité du travail en s’immergeant dans le monde de l’entreprise. C’est aussi un temps d’apprentissage, durant lequel le jeune acquiert des compétences concrètes, en rapport avec son projet professionnel et en dehors du seul cadre scolaire théorique. Cela lui permet également de mettre en valeur d’autres facettes de sa personnalité.

 

Pour l’entreprise, le stage représente aussi un temps bénéfique, qui lui permet de transmettre ses savoirs, de participer à la formation des jeunes, bref, de jouer un rôle citoyen.

 

Le danger réside dans les risques d’abus, qui transformeraient le stage en emploi déguisé. Certaines entreprises, ou associations, peuvent en effet être tentées d’utiliser une main-d’œuvre bon marché, jeune et motivée. Des difficultés de recrutement, une situation financière difficile : ces raisons peuvent pousser à un recours abusif aux stages, en particulier lorsque les jeunes ne trouvent pas d’emploi. Pourtant, le stage ne peut être un emploi et doit rester un moment pédagogique. Tel est le sens de cette proposition de loi.

 

Le texte prévoit un encadrement identique pour tous les stages. Une autre démarche était possible, portée – mais je ne veux pas trahir leurs conceptions – par les groupes UDI et UMP : les différents secteurs n’ayant pas les mêmes besoins et faisant face à des difficultés de recrutement, il aurait fallu adapter les dispositions de la proposition de loi en fonction des secteurs et des situations. Pour difficile qu’elle soit, cette proposition avait sa logique. Cela n’a cependant pas été le parti que nous avons choisi. Nous avons décidé de mettre en place un cadre identique pour tous, facile à comprendre et à interpréter et susceptible de servir de référence à tous.

 

Quels sont les acquis de cette proposition de loi ? Les auteurs ont fait le choix de limiter la durée des stages à six mois au maximum, pour que ce moment de formation reste borné dans le temps. Cela permet de mettre un terme à ces situations insupportables où des étudiants restent neuf mois ou un an en stage, en ne touchant que 400 euros par mois durant toute cette période.

 

Pour renforcer l’objectif pédagogique du stage, la proposition de loi instaure un volume minimal de formation en établissement avant la délivrance d’une convention. Cette mesure est accompagnée d’une obligation d’encadrement de l’étudiant, aussi bien universitaire, via l’enseignant référent, que professionnel, via le tuteur de stage, avec un nombre maximal d’étudiants par tuteur et par enseignant. L’accompagnement pédagogique est ainsi renforcé.

 

Concernant la protection des stagiaires, le texte établit des durées de travail maximales, reconnaît des droits aux congés, aux titres restaurants et aux frais de transport et renforce le rôle de l’inspection du travail pour contrôler les abus. Ces mesures permettent de compléter le dispositif, afin de mieux intégrer les stagiaires.

 

Lorsque l’on parle de stage, il ne faut pas oublier la question de la gratification. Un stage entraîne en effet des frais : on se déplace et on quitte ses pratiques habituelles. Il ne s’agit pas, bien sûr, d’un salaire, car le stagiaire n’est pas et ne doit pas devenir, un salarié. Ces gratifications, peu élevées, doivent permettre aux stagiaires de s’installer dans un nouveau contexte pour la durée de leur stage.

 

Lors de l’examen du texte en première lecture, le Sénat avait voté plusieurs mesures plus favorables aux stagiaires : la gratification des stages avait été augmentée de 436 euros à 523 euros et la durée de stage à partir de laquelle un stagiaire a droit à une rémunération était passée de deux mois à un mois.

 

Cependant, la commission mixte paritaire est revenue sur l’une de ces avancées. L’augmentation de la gratification est en effet repoussée à septembre 2015, mais l’obligation de rémunérer les stages ne s’appliquera qu’à partir de la fin du deuxième mois, comme c’est le cas aujourd’hui.

 

Nous regrettons ce recul, puisque nous avions participé au vote de ces amendements. Néanmoins, les écologistes voteront pour ce texte, pour l’ensemble des règles qu’il propose et pour la protection accrue des stagiaires.

 

J’ajoute que tout encadrement des stages, aussi bonne que soit la loi – et à mon sens, nous avons trouvé ici un équilibre au regard des deux objectifs que j’ai évoqués initialement –, peinera à limiter les abus tant que les jeunes ne trouveront pas rapidement un premier emploi adapté à leur qualification.

 

Madame la ministre, oui, les membres du groupe écologiste voteront cette proposition de loi et, oui, ils seront à vos côtés pour trouver un débouché professionnel à chaque jeune sortant de formation !

 

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