Le plan de relance et les lobbys

Interventions de Jean Desessard à la séance du 23 janvier 2009 sur le Plan de relance. (extraits du compte rendu des débats)

Amendement « Formule 1 »

M. Jean Desessard. Les articles additionnels sont toujours l’occasion pour les lobbies de s’exprimer : il y a la relance, et chacun y va de son petit projet ! Avec cet amendement, c’est le lobby de la fédération automobile qui parle ! Monsieur le ministre, je suis bien sûr content de vous revoir, comme toujours ! (Sourires.) J’aurais néanmoins aimé que vous ayez une autre appréciation sur cet amendement. Cet amendement est l’exemple type d’une mesure anti-environnement : il ne présente aucun intérêt économique pour la collectivité, mais il sert en revanche l’intérêt financier de quelques sociétés privées ! Chose étonnante, il a été déposé, à l’origine, par des sénateurs des Bouches-du-Rhône et des Deux-Sèvres, rejoints ensuite par d’autres. Je suis néanmoins surpris de ne pas voir apparaître le nom des sénateurs des Yvelines ! Peut-être ces derniers, ne voulant pas paraître aller à l’encontre des desiderata de la population de leur département, font-ils présenter l’amendement par leurs collègues du Sud ? Ils auraient tout de même pu venir le défendre et dire tout simplement qu’ils voulaient un circuit de Formule 1 dans les Yvelines, malgré l’avis des habitants ! Le circuit de Magny-Cours, dans la Nièvre, n’étant plus en mesure d’accueillir le Grand Prix de France de Formule 1, la Fédération française du sport automobile est en quête d’un circuit. Cet amendement de circonstance vise donc à accélérer la réalisation de ce projet, contre l’avis des habitants et des agriculteurs biologiques installés sur les terrains pressentis pour accueillir ce circuit nuisible pour l’environnement. En effet, madame le rapporteur, ces terrains avaient été sélectionnés par l’Agence des espaces verts pour accueillir le plus grand domaine d’agriculture biologique d’Île-de-France. (Mme Odette Terrade acquiesce.) Monsieur le ministre, la région connaît un retard considérable dans la réalisation des objectifs du Grenelle de l’environnement, soit 6 % d’agriculture biologique en 2012 et 20 % en 2020. Or, aujourd’hui, on en est à peine à …0,78 % ! Vous voyez le chemin qu’il reste à parcourir ! Je rappelle l’intérêt de doter la capitale et l’Île-de-France de cultures vivrières de proximité. Il faut des cultures et des terrains agricoles à côté de la capitale, à côté d’un bassin de population ! C’est ça, l’économie ! De plus, le projet d’implantation du circuit de Formule 1, avec toutes les pollutions qu’une telle installation peut engendrer, se trouve à proximité d’un captage d’eau potable qui alimente les foyers de plus de 400 000 Franciliens. Alors que des grandes entreprises du secteur de la Formule 1, comme Honda et Subaru, se désengagent du championnat et après l’échec du circuit de Magny-Cours, il me paraît clair que ce type d’investissement n’est pas rentable pour l’économie, au contraire des cultures vivrières. De surcroît, la recherche de la performance dans le secteur automobile doit être axée sur l’énergie propre et non sur la quête de la vitesse maximale. Je rappelle que les politiques publiques et les campagnes publicitaires afférentes font aujourd’hui la promotion de l’économie d’énergie, du véhicule moins polluant et moins gourmand, et le secrétaire d’État aux transports comme le ministre en charge du dossier n’ont de cesse de vouloir faire respecter les limitations de vitesse sur l’ensemble du territoire au nom de la sécurité publique.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Jean Desessard. Dans l’objet de l’amendement n° 85 rectifié quinquies, il est précisé que le projet de circuit automobile en question est important pour le secteur du bâtiment et des travaux publics. Mais, mes chers collègues – vous n’avez peut-être pas l’habitude de prendre les transports en commun en Île-de-France ; ce n’est évidemment pas le cas des premiers cosignataires de l’amendement qui sont élus des Bouches-du-Rhône et des Deux-Sèvres -, ne pensez-vous pas que ce serait plutôt l’infrastructure des transports collectifs qui aurait besoin d’être améliorée ? Gardons à l’esprit tous les retards enregistrés chaque matin et qui résultent non de grèves – qui n’y sont pas pour grand-chose – mais de dysfonctionnements de la SNCF et de la RATP.

M. Jean-Pierre Raffarin. Il y a des trains dans la région Poitou-Charentes ! Vous n’avez pas le monopole des trains !

M. Jean Desessard. Vous prenez peut-être le train, mais le RER et le métro ?…

M. Jean-Pierre Raffarin. Nous avons les TER !

M. Jean Desessard. Je suis content que vous preniez le train. Mais, si vous affirmez que tout va bien, cela signifie que vous ne l’empruntez pas souvent ou à des horaires particuliers, ou qu’une personne travaillant à la SNCF vous accompagne ! La personne qui prend régulièrement le RER ne peut que constater une situation désastreuse.

M. Jean-Pierre Raffarin. Si la situation est si mauvaise, c’est que la région s’occupe mal du problème. Parlez-en à vos amis !

M. Jean Desessard. Si un investissement doit être effectué, il ne doit pas être destiné à un circuit de Formule 1 mais plutôt à l’amélioration des lignes du RER en Île-de-France. La crise économique ne doit pas être un prétexte pour malmener les objectifs du Grenelle de l’environnement et le plan de relance ne doit pas servir à faire adopter discrètement les pires projets contraires à l’esprit du Grenelle. Les sénatrices et sénateurs Verts s’opposent donc avec force à cet amendement injuste dépourvu de tout intérêt économique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) […] M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Patrick Devedjian, ministre. Le projet en question ne relève pas d’un financement public. Lisez l’amendement ! Il s’agit de permettre l’établissement d’une convention d’occupation temporaire du domaine public.

Mme Bariza Khiari. Avec une délégation de service public.

M. Patrick Devedjian, ministre. Ensuite, il faudra organiser un tour de table afin d’en permettre financièrement la réalisation. Cet investissement s’ajoute donc à celui du plan de relance. Nous recherchons les effets multiplicateurs. Ce critère est en l’occurrence satisfait.

M. Jean Desessard. Il n’est pas facile de faire de l’agriculture biologique à 300 kilomètres par heure !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 85 rectifié quinquies.

(L’amendement est adopté.)

Articles sur les architectes des bâtiments de France

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 62 et 105.

M. Jean Desessard. Je serai bref, tant les explications de mes collègues du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste ont été bonnes ; j’évoquerai seulement l’intérêt économique qui sous-tend cette disposition. Cet article 5 quater offre un exemple supplémentaire de la volonté du Gouvernement de s’attaquer aux règles qui protègent, en l’occurrence, l’environnement architectural. Mes chers collègues de la majorité, la croissance, qui vous tient tant à cœur, vous devriez plutôt aller la chercher du côté des domaines d’activité verts, comme le « tourisme doux » ! Tout à l’heure, j’ai évoqué les cultures vivrières, qui sont bien plus utiles qu’un circuit de formule 1. À présent, j’attire votre attention sur l’importance du « tourisme doux ». Nos sites préservés pour leur architecture remarquable font l’attrait de notre pays aux yeux des touristes étrangers. En mettant en cause la place des architectes des bâtiments de France, vous menacez la cohérence de notre patrimoine architectural, qui fait la renommée touristique de notre pays dans le monde entier, plus qu’un circuit de formule 1 d’ailleurs ! Cet article est donc contre-productif. Sous le prétexte d’aller chercher la croissance là où elle ne se trouve pas, vous menacez un secteur économique écologiquement viable. C’est pourquoi nous demandons au Sénat de voter la suppression de l’article 5 quater de ce projet de loi. Par ailleurs, comme je ne suis pas toujours bien renseigné (Exclamations amusées), je voudrais poser une question. J’espère obtenir une réponse, et peut-être M. Pasqua, qui est en général bien informé, me la donnera-t-il. (Sourires.)

M. Charles Pasqua. N’avez-vous pas commencé votre intervention en soulignant le plaisir que vous aviez de revoir M. Devedjian !

M. Jean Desessard. Certes, j’aurai le plaisir d’entendre M. Devedjian répondre à ma question ! Nous voyons bien que ces articles additionnels sont inspirés par les lobbys. Dès lors, l’article 5 quater ne serait-il pas destiné à faire plaisir à l’émir du Qatar au sujet de l’hôtel Lambert ? (Mmes Odette Terrade et Marie-Thérèse Hermange s’exclament.) En effet, nous nous posons des questions. Comme chacun y va de sa petite demande, il n’y a aucune raison qu’une personne un peu plus riche que les autres ne réclame pas, elle aussi, une disposition législative ! Après tout, l’émir du Qatar a bien le droit de demander à être exonéré de l’application de la loi et à pouvoir aménager comme il l’entend l’hôtel Lambert, qui se trouve dans un site remarquable, sur l’île Saint-Louis ! Il veut y réaliser des travaux qui ne sont pas conformes aux règles, et le maire de Paris s’y oppose, comme l’architecte des Bâtiments de France. Dès lors, cet article ne servirait-il pas à lui rendre les choses plus faciles ? Vous pouvez nous le dire, monsieur le ministre, nous sommes entre nous ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Patrick Devedjian, ministre. J’espère que vous serez content de m’entendre, monsieur Desessard ! En l’occurrence, l’hôtel Lambert se situe dans un secteur protégé. Il faut donc obligatoirement un avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France.

M. Jean Desessard. Mais vous voulez le supprimer !

M. Patrick Devedjian, ministre. Non !

Amendement sur les autoroutes

M. Jean Desessard. Je constate, monsieur le président, que la rapidité d’exécution dont il est question va surtout dans le sens d’une exécution du Grenelle de l’environnement. Maintenant, c’est le tour du lobby autoroutier… Lui, il avait besoin d’une année supplémentaire ! Il ne gagne pas assez d’argent ! Il n’a pas assez de contrats ! On avait signé des décrets comme çà… C’était mal pensé ! Il aura donc fallu une crise économique pour que l’on se rende compte de la nécessité d’une année supplémentaire… Formidable ! Nous savons bien que cet amendement vient du lobby autoroutier ! D’ailleurs, ces articles additionnels sont particulièrement éclairants à ce sujet. Il serait même intéressant que nous soient communiqués – peut-être pas en séance plénière – les noms des entreprises qui nous aident à rédiger de tels amendements. Monsieur le ministre, vous savez que j’ai plaisir à vous entendre et à vous retrouver dans cet hémicycle. Mais pourquoi laissez-vous faire cela ?

M. Patrick Devedjian, ministre. Il s’agit de travaux d’environnement !

M. Jean Desessard. Cette astuce est classique, monsieur le ministre ! On demande de l’argent sous prétexte de projets en faveur de l’environnement, et on se contente de mettre quelques parterres de fleurs. Savez-vous comment on procédait, à Paris, pour enlever un jardin ? On n’annonçait évidemment pas qu’on allait construire un immeuble de luxe ou un hôtel accueillant des émirs ou d’autres pensionnaires de ce genre. On évoquait la construction d’un logement social. On plaçait donc le logement social sur le jardin et nous, les écologistes, qui soutenions à la fois les logements sociaux et les jardins, nous étions bien embêtés ! L’astuce est toujours la même : il s’agit de reprendre les arguments des autres ! Il est plus facile d’invoquer l’environnement plutôt que d’annoncer un projet qui permettra au président-directeur général et aux actionnaires de l’entreprise de s’en mettre plein les poches. L’argument est tout de même plus noble. En réalité, dans quel domaine devrions-nous développer les infrastructures ?

Mme Nathalie Goulet. Le train !

M. Jean Desessard. Bien sûr ! Le réseau ferroviaire ! Nous savons qu’il est dans un état déplorable. Les régions en ont besoin et je ne reviens pas sur la question précise du RER francilien… Mais il y a aussi bien d’autres projets en dehors du transport ferré. Si le train ne vous plaît pas, monsieur le ministre, nous pouvons travailler sur les voies d’eau ou sur des systèmes tels que le transport combiné.

M. Michel Guerry. Les pistes cyclables !

M. Jean Desessard. En tout cas, ce n’est pas le secteur autoroutier qu’il faut développer ! M. Guillaume Pepy, occupé par les grèves à la gare Saint-Lazare, a peut-être pris un peu de retard… Il aurait dû intervenir ! Au demeurant, comme il représente une société d’État, il n’aurait certainement pas été écouté. En revanche, les promoteurs privés, on les écoute et on présente des amendements en leur faveur ! Vous comprendrez que les sénatrices et les sénateurs Verts s’opposent fermement à ces amendements lobbyistes et anti-environnementaux.

Amendement sur les Installations Classées

M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, j’avais dit que j’avais plaisir à vous voir. Cependant, j’ai maintenant nettement moins de plaisir à vous entendre. En effet, vous êtes en train de tuer le Grenelle de l’environnement. Vous le savez, l’environnement est fragile, monsieur le ministre. La convalescence d’une personne tombée malade du jour au lendemain peut prendre beaucoup de temps. De même, si la nature et l’environnement peuvent être détruits très rapidement, réparer les dégâts prend ensuite beaucoup de temps, et ce d’autant plus lorsque nos intérêts économiques et nos habitudes de consommation vont à l’encontre de ce souci de l’environnement. M. Patrick Devedjian, ministre. L’homme est méchant ! M. Jean Desessard. Sachez, monsieur le ministre, que la richesse ne consiste pas à bétonner ou à construire de nouvelles autoroutes, mais à préserver la biodiversité et l’environnement, à préserver des surfaces agricoles à proximité des centres de population. C’est une autre forme de développement. Je croyais que le Gouvernement avait progressé, mais je constate que désormais l’on déboulonne tout. Les freins sont lâchés ! On a un peu réfléchi sur l’environnement mais, dans la panique, dans l’empressement mis à enclencher la relance, on donne satisfaction aux promoteurs et à tous les pollueurs ! Vous n’en serez pas plus riche, monsieur le ministre, et cela ne réussira pas. En revanche, l’environnement s’en trouvera dégradé. Voilà que vous revenez à la charge dans le cadre du plan de relance. Certains pourraient prétendre que des blocages ont freiné le développement économique que nous aurions pu connaître, mais on pourrait leur répondre que les États-Unis, qui n’ont pourtant pas connu beaucoup de blocages, n’ont pas eu les succès économiques qu’ils escomptaient. Alors qu’on cite souvent les exemples américain et anglais, j’ai entendu quelques hommes politiques de droite déclarer dans notre hémicycle que la France avait un grand secteur public qui jouait un rôle d’amortisseur. Voilà qui fait plaisir ! Combien de fois avons-nous dit que de grands services publics étaient utiles à l’économie ? Sur les travées de la droite, au banc du Gouvernement, au banc des commissions, on nous répondait que nous nous trompions, qu’il fallait privatiser, moderniser et tout permettre. Et voilà que vous dites aujourd’hui que la France s’en sort mieux grâce à un grand secteur public qui joue un rôle d’amortisseur des crises ! Lors de la séance du 10 juillet dernier, Mme la ministre Christine Lagarde avait déjà présenté un amendement au contenu similaire à celui de l’article 6 de ce projet de loi. Il visait déjà à simplifier la procédure dans le domaine des installations classées pour la protection de l’environnement. Vous revenez nous présenter – décidément, la relance sert à tout ! – la même demande d’habilitation à modifier le code de l’environnement par ordonnance, pour cette fois-ci « supprim[er] des procédures disproportionnées faisant obstacle à l’implantation des entreprises. ». Nous verrons bien s’il y a des morts, des effets Seveso, etc. Autant dire que vous ouvrez une boîte de Pandore en permettant à certaines de ces installations, potentiellement dangereuses pour l’environnement, de s’affranchir des procédures d’autorisation actuelles. Sur les 500 000 installations classées, 50 000 – les plus dangereuses – sont soumises à autorisation. Une simple déclaration d’installation suffit pour les autres. La procédure actuelle, que vous jugez trop lourde, ne concerne donc qu’une faible partie des installations – environ 10 % d’entre elles. Elle permet d’assurer la sécurité des citoyens, ce qui n’est pas rien, et leur garantit le droit à vivre dans un environnement équilibré et favorable à la santé, conformément à l’article 1er de la Charte de l’environnement, inscrite dans notre Constitution, que j’ai voté ; ne soyez pas tenté de me reprocher de ne pas l’avoir votée… Je m’interroge sur les réelles motivations du Gouvernement lorsqu’il souhaite légiférer par ordonnance sur ce sujet. Ne voulez-vous pas plutôt mettre en place un régime palliatif pour tenter de suppléer l’absence cruelle des moyens de l’État, comme l’a dit ma collègue Odette Terrade, pour examiner les procédures d’autorisation des requérants et contrôler les installations classées pour la protection de l’environnement ? Comme l’amendement du 10 juillet dernier, cet article est en totale contradiction avec les conclusions du Grenelle de l’environnement, qui faisaient naître l’espoir d’un nouveau dialogue sur l’environnement et dont notre assemblée étudiera la semaine prochaine les mesures de mise en œuvre. Il nous fait également craindre une privatisation du contrôle des installations classées et constitue une menace pour la sécurité des citoyens et le respect de notre environnement.

Explication de vote sur l’ensemble du texte

M. Jean Desessard. Je serai bref, et j’aurais pourtant beaucoup à dire ! (Sourires.) Je veux tout d’abord vous remercier, monsieur le président, de la manière remarquable dont vous avez mené nos travaux, mais aussi les secrétaires du Sénat, qui vous ont secondé avec une grande vigilance au cours de cette séance, et les rapporteurs, qui nous ont fourni des explications tout à fait sérieuses. Monsieur le ministre, j’ai eu plaisir à vous voir au banc du Gouvernement parce que vous prenez toujours le temps d’expliciter les choses et de répondre aux parlementaires. Je vous en remercie, car ce n’est pas si courant. Cela étant dit, monsieur le ministre,… (Rires.)

M. Patrick Devedjian, ministre. In cauda venenum !

M. Jean Desessard. Eh oui ! Vous le savez aussi bien que moi, face à une crise, on a le choix entre deux attitudes. La première consiste à s’interroger sur ce qui n’a pas fonctionné : la crise est-elle due à une trop grande distorsion entre le réel et le virtuel, entre ceux qui manipulent des sommes énormes sans contact avec la société et la masse des citoyens ordinaires ? Est-elle due aux délocalisations, qui conduisent à la disparition des producteurs percevant un salaire et bientôt, par le fait même, à celle des consommateurs ? Est-elle due à une pénurie de ressources naturelles, de sources énergétiques ? Bref, on réfléchit et on se demande s’il existe une autre voie. La seconde attitude consiste à se dire que l’on n’a peut-être pas assez « appuyé sur le champignon » et qu’il faut encore plus bétonner, privatiser et simplifier. C’est malheureusement celle que vous avez adoptée, monsieur le ministre, avec ce projet de loi. Au lieu de réfléchir pour étudier des solutions à long terme, vous semblez considérer que, jusqu’à présent, on n’y est pas allé assez fort et que, désormais, il faut « y aller franco ». Alors, vous vous dites qu’il y a toute une série de freins, des « écolos » qui bloquent telle ou telle construction, les Bâtiments de France… Quoi, on a délimité une réserve vivrière en Île-de-France ? Mais c’est inconcevable de vouloir préserver des terres agricoles dans cette région ! Mieux vaut construire à la place un circuit de Formule 1 ! Et vous libérez à tout va ! Si vous croyez que c’est ainsi que vous obtiendrez ainsi une relance durable ! Sûrement pas, et le problème resurgira dans quelques années. Et s’il n’y avait que la France à raisonner ainsi ! Malheureusement, je crains que tous les pays ne réagissent aujourd’hui de la même manière, croyant que l’on crée de la richesse en construisant, en bétonnant, en prolongeant ou en élargissant les autoroutes, etc. Favoriser la vraie richesse, c’est préserver la nature et l’environnement, c’est développer la solidarité, c’est encourager la production de proximité, y compris et en particulier en Île-de-France. Pour ces raisons, les sénatrices et sénateurs Verts ne pourront pas voter ce plan de relance, car il ne résulte pas d’une réflexion sur les grandes orientations du développement durable, mais il tend, au contraire, à faire sauter les barrières, ce qui ne fera qu’accroître et aggraver les atteintes à l’environnement. De surcroît, les lobbies se sont engouffrés dans la brèche – c’était le moment où jamais ! – et chacun y est allé de sa demande. Il est dommage que tant la commission des affaires économiques que le Gouvernement aient donné leur aval à ces demandes particulières. Je crains que nous ne soyons malheureusement minoritaires à défendre ce point de vue, mais il est important que nous l’exprimions. Au moins aurons-nous dit que ce dispositif n’est ni un plan de relance de l’économie ni un plan de solidarité, mais une véritable atteinte à l’environnement !