Intervention dans le cadre du débat sur la mise en oeuvre du « Charles De Gaulle express »

Je suis intervenu hier dans le cadre du débat sur les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi ratifiant les ordonnance pour la mise en œuvre d’une liaison ferroviaire entre Paris et l’aéroport Roissy Charles De Gaulle, plus connue le nom de Charles De Gaulle Express.

J’ai réaffirmé l’opposition des écologistes à ce projet inutile qui créera deux catégories de voyageurs et différera la nécessaire rénovation du RER B. En effet, avec un prix du billet prévu à 24 €, ce train s’apparente à une navette de luxe pour les hommes d’affaires et les touristes les plus aisés et ne répond pas aux besoins de mobilité des Franciliens.

Vous trouverez ci-dessous le texte de mon intervention :

 

Monsieur le Président,

Monsieur le Ministre,

Monsieur le rapporteur,

Mes chers collègues,

Ce projet de loi ratifie l’ordonnance permettant la création d’une ligne de train dédiée pour relier directement, sans arrêt intermédiaire, l’aéroport Charles-de-Gaulle au centre de Paris d’ici à 2023.

Touristes et acteurs économiques pourront ainsi rejoindre la capitale en vingt minutes. En sens inverse, les usagers de l’aéroport pourraient s’y rendre depuis Paris sans se préoccuper d’éventuels retards. Le RER B, deuxième ligne la plus empruntée d’Europe avec ses quelques 900 000 passagers par jour, ne correspondrait pas aux standards de qualité attendus.

Les membres du groupe écologiste ont trois oppositions à formuler à ce projet.

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Tout d’abord, concernant le RER B, malgré un plan de rénovation, annoncé il y a quelques années de 650 millions d’euros de budget, la situation est toujours aussi insupportable pour les usagers. L’état des rames est déplorable. Les pannes et les retards sont presque systématiques, tout particulièrement aux heures de pointe.

On nous propose aujourd’hui un très lourd investissement, d’1,7 milliard d’euros, pour le projet CDG Express, qui transportera 20 000 voyageurs quotidiens, et rien pour améliorer significativement le RER B, qui, lui, transporte chaque jour 900 000 usagers …

Or, toutes les études montrent que des travaux structurels très importants doivent être menés pour que cette ligne fonctionne de nouveau convenablement ! On l’a vu encore récemment avec la mise en œuvre de la circulation alternée : dès qu’il y a une augmentation, même temporaire, du nombre de voyageurs, les caténaires lâchent ! Ce n’est pas acceptable, a fortiori lorsqu’on incite, à raison, les gens à prendre les transports en commun pour lutter contre la pollution.

De plus, le coût prévu de l’aller simple sur cette future ligne – 24 euros – non pris en charge par le Pass navigo, exclut de fait les usagers franciliens, les salariés de l’aéroport et beaucoup de voyageurs. De fait les reports prévus du REB B au CDG Express sont seulement de 6%…

On nous propose de faire coexister deux modes de transport très inégalitaires : pour les plus aisés, une liaison directe, confortable et rapide ; pour tous les autres, des retards, des pannes, des trains annulés et des rames bondées.

Regardons chez nos voisins, comme on nous y invite souvent : à Berlin, le trajet aéroport/centre-ville coûte 3 euros, à Rome 14 €, à Bruxelles 8,5 €… loin du coût prohibitif annoncé du CDG Express et bien plus proche du service assuré par le RER B, quand il fonctionne normalement.

Notons également, que, ne s’y arrêtant pas, le nouveau train n’apporterait aucun bénéfice aux habitants des villes de Seine-Saint-Denis traversées. En revanche, le passage de 152 rames par jour induirait, pour eux, de nouvelles nuisances visuelles et sonores.

Pire encore, un engorgement des voies du RER B,  en partie utilisées en partie par ce train fantôme, engendrera mécaniquement encore plus de retard sur cette ligne.

Et tout cela pour quoi ? A peine 10 minutes de gagnées lorsque le RER fonctionne bien…

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Par ailleurs, ce projet concurrence celui de la ligne 17 du Grand Paris Express, qui, en 2023, doit relier l’aéroport Charles-de-Gaulle à la gare de Saint-Denis-Pleyel. Cette dernière est censée devenir un lieu d’intermodalité, offrant de nombreuses correspondances. Monsieur le secrétaire d’État, pourquoi un tel doublon ?

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Enfin, le rapport issu de l’enquête publique met en exergue d’importantes zones d’ombre au sujet du financement de ce projet. En particulier, deux réserves sont formulées: outre qu’il est « difficile d’apprécier le bien-fondé des dépenses », la rentabilité du projet ne serait pas forcément suffisante pour atteindre l’équilibre. De surcroît, l’enquête publique déplore « le manque de précision sur le recours aux fonds propres ou à l’emprunt, aux subventions publiques ou européennes ».

Le montage financier est encore extrêmement opaque à ce stade. Nous voulions être sûrs qu’un système de transports aussi inégalitaire ne sera pas financé par de l’argent public, mais les débats ne nous ont pas rassurés.

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Le groupe écologiste ne soutient donc pas ce projet, car il ne permet pas de doter l’Île-de-France d’un système de transport permettant à la fois une desserte aéroportuaire de qualité et des liaisons, directes et omnibus, au bénéfice des Franciliens, des salariés de l’aéroport et des voyageurs.