« Le Sénat adopte la réforme des retraites » (Libération)

Le vote définitif du projet de loi, après une réunion de la commission mixte paritaire pour unifier les versions des deux chambres, doit avoir lieu mardi au Sénat et mercredi à l’Assemblée nationale.

Par LIBÉRATION.FR

Adopté. Le Sénat a voté, ce vendredi, peu après 20 heures, le projet de loi réformant les retraites. Sous haute pression du pouvoir qui pressait d’accélérer les débats, comme du mouvement social, qui a, à plusieurs reprises, protesté devant le Palais du Luxembourg. Et à l’issue d’un long marathon – quelque 150 heures d’échanges -, raccourci, jeudi, par une procédure de «vote unique» sur une partie des articles additionnels, demandée par le gouvernement.

Le texte a été adopté par 177 voix contre 153. La majorité UMP et Union Centriste a voté pour sauf les centristes du Modem qui se sont abstenus. La gauche PS, CRC-SPG (communistes et parti de gauche), Verts et RDSE (Radicaux, à majorité radicaux de gauche) ont voté contre.

Encore très remontée par l’intervention de l’exécutif pour ratiboiser l’examen du texte, l’opposition a dénoncé «un coup de force mis en œuvre sur injonction de l’Elysée», à l’instar du socialiste David Assouline, donnant à Eric Woerth du «M.le censeur». «Le fin du fin c’est la censure du gouvernement, les droits de l’opposition ont été bafoués», s’afflige Jean Desessard (Verts).

«Il faut céder aux désirs du prince»

«Il faut céder aux désirs du prince. […] Par votre faute, le pays est bloqué, vous répondez par un vote bloqué», lance Jean-Pierre Bel, président du groupe PS au Sénat, tandis que Nicole Borvo Cohen-Seat (PCF) s’inquiète de voir le président de la République «répondre par l’affrontement» et «jouer avec le feu».

Une surdité, déplore plus généralement la gauche, qui a été constante durant les trois semaines de discussion, voire «historique», selon Jean-Pierre Bel:«Jamais un pouvoir n’aura été aussi insensible et sourd à un mouvement social en profondeur, massif.»

«Nous avons eu un vrai débat avec deux fois plus de temps qu’à l’Assemblée Nationale», démentait le président (UMP) de la Haute-Assemblée, Gérard Larcher, sur Public Sénat. «Le débat a été riche et surtout utile. L’un des plus longs de la Ve République, assure le ministre du Travail, Eric Woerth dans l’hémicycle. L’opposition a eu plus que son mot à dire.»

Sur le fond de la réforme, le communiste Guy Fischer s’en prend à «une réforme brutale, injuste, inefficace», «véritable loi de régression sociale, certainement la plus grave depuis l’après-guerre». Selon lui, «la retraite par répartition aura été jetée par dessus bord».

«Le temps fera son œuvre sur l’âge de la retraite»

Eric Woerth, à l’inverse, défend «un projet de loi fondamental pour l’avenir de notre système par répartition». Pour justifier le report de l’âge de la retraite, il renvoie à ses détracteurs: «Les vrais défenseurs de notre système social sont ceux qui garantissent son avenir.» Et de prédire avec un certain effort d’imagination un consensus, à terme, autour de son texte: «Un jour viendra où les adversaires d’hier seront reconnaissants au président de la République, au gouvernement, à la majorité d’avoir eu le courage d’assumer entièrement sa responsabilité. Le temps fera son oeuvre sur l’âge de la retraite.»

Du côté des centristes, le président du groupe Nicolas About, estime avoir obtenu des avancées, d’abord sur l’inscription d’un rendez-vous en 2013 pour réfléchir à une «réforme systémique»: «nous sommes heureux d’avoir été entendus sur cette évolution vers la retraite par points», seule selon les centristes à pouvoir «assurer l’équilibre, la transparence et l’équité de notre système à long terme». Avec une -petite- concession sur le maintien de la retraite à 65 ans sans décote, pour certaines mères de trois enfants et les parents d’enfants handicapés, le texte a été «amélioré dans le sens d’une plus grande équité», se félicite About, qui regrette juste un dispositif trop timide sur la pénibilité. D’où le vote de la réforme par «la très large majorité du groupe». Un soutien déterminant au Sénat où les centristes jouent les arbitres, l’UMP ne disposant que d’une majorité relative.

Adopté le 15 septembre à l’Assemblée nationale, le projet de loi se trouve donc dans sa toute dernière ligne droite parlementaire, puisque, dès lundi à 9 heures, une commission mixte paritaire, composée de 7 sénateurs et de 7 députés se réunira pour unifier les versions des deux chambres. Au pas de charge. Le texte commun sera ensuite soumis, mardi, aux sénateurs puis aux députés mercredi, pour un vote définitif de la réforme.

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