Le Sénat adopte le compromis du gouvernement pour encadrer la publicité sur le vin (Le Monde)

Les applaudissements des sénateurs ont dû aller droit au cœur d’un Philippe Douste-Blazy visiblement ravi. Mercredi 19 janvier, le Sénat a, en effet, voté à l’unanimité moins les abstentions des élus Verts l’amendement sur la publicité en faveur de l’alcool que le ministre de la santé présentait au nom du gouvernement dans le cadre de la seconde lecture du projet de loi sur le développement des territoires ruraux. Ce vote revient donc sur l’assouplissement de la loi Evin qu’avaient voté en première lecture les sénateurs, puis les députés en seconde lecture.

Cette issue ne constitue pas une surprise, car la rédaction élaborée par le cabinet du ministre avait reçu une double onction : celle des défenseurs de la loi Evin, notamment à travers l’appui de l’Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (Anpaa), et celle des représentants de la filière viticole (Le Monde du 13 janvier).

Aussi, a-t-on entendu dans l’Hémicycle un concert d’interventions plus consensuelles les unes que les autres, malgré des motivations différentes. D’emblée, Gérard César (UMP, Gironde), Aymeric de Montesquiou (Rassemblement démocratique et social européen, Gers), Guy Fischer (groupe communiste républicain et citoyen, Rhône), Roland Courteau (groupe socialiste, Aude) et Philippe Arnaud (Union centriste, Charente) ont expliqué qu’ils voteraient l’amendement. La seule note discordante est venue du Vert Jean Desessard (Paris), dont l’amendement plus restrictif sur la publicité en faveur de l’alcool n’a finalement pas été soumis au vote.

L’amendement du gouvernement tient en deux phrases. La première précise que la publicité en faveur des boissons alcooliques « peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d’origine telles que définies à l’article L. 115-1 du code de la consommation ou aux indications géographiques telles que définies dans les conventions et traités internationaux régulièrement ratifiés ».

« UNION SACRÉE »

La seconde dispose que cette publicité « peut également comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit ». Avant que les sénateurs passent au vote, le ministre de la santé a cité l’Anpaa pour qui l’ »amendement précise la loi actuelle sans la dénaturer. » Pour Philippe Douste-Blazy, le texte proposé permet à une publicité de « décrire le produit mais pas les actes de consommation, d’évoquer les caractéristiques objectives mais pas les subjectives, d’être informative et pas attractive ».

Rappelant que la loi Evin autorise les références aux indications sur l’origine de même qu’aux terroirs de production, le ministre a indiqué qu’il avait souhaité prendre en compte la préoccupation des viticulteurs de pouvoir évoquer « les qualités intrinsèques » de leurs produits.

Dans le même esprit, il a évoqué « tous les jours les publicités dans les journaux pour les alcools forts », réservées à « ceux qui ont les moyens » de les payer. M. Douste-Blazy a cependant ajouté qu’il était « absolument nécessaire de ne pas modifier l’esprit de la loi Evin dans un pays qui compte 45 000 décès annuels dus à l’alcool et 5 millions de personnes exposées à des difficultés médicales, psychologiques et médico-sociales » du fait de leur consommation d’alcool.

Des chiffres qu’avaient évoqués Guy Fischer et Anne-Marie Payet (Union centriste, La Réunion). Mme Payet avait d’ailleurs souligné que « deux tiers des 45 000 décès par an dus à l’alcool sont imputables au vin », tandis que M. Fischer affirmait que les deux tiers des personnes soignées pour un problème d’alcool étaient dépendantes du vin.

Une tonalité singulièrement différente de celle adoptée par Roland Courteau, saluant une « union sacrée autour du vin » et appelant à une « trêve dans les attaques systématiques contre le vin ».

Paul Benkimoun